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Histoire de la presse écrite à Rimouski – 2e partie

Depuis plus de 150 ans, pas moins de 18 journaux ont été publiés à Rimouski. Voici la suite de cette histoire de la presse écrite locale.
La première page du journal Le Rimouskois du 5 juin 1968.

Le Rimouskois, le Progrès-Écho et l’Écho-Dimanche

Le 6 décembre 1967, un nouveau journal voit le jour dans notre ville; Le Rimouskois. Il s’agit d’un événement marquant au Québec car Le Rimouskois devient le tout premier journal hebdomadaire à distribution gratuite dans la province, une décision très audacieuse à l’époque de son fondateur Philippe Leblond, mais rapidement imitée dans toutes les régions.

Un an plus tard, le 23 décembre 1968, la famille Brillant, qui procède depuis quelques années à la liquidation des entreprises fondées ou achetées par le patriarche Jules-A. Brillant, vend Le Progrès du Golfe et L’Écho du Bas-Saint-Laurent aux frères André, Claude et Roland Bellavance. Comprenant qu’il sera difficile de maintenir trois hebdomadaires dans une ville qui compte alors 29 000 habitants, les frères Bellavance fusionnent le Progrès et l’Écho le 4 mai 1970 pour créer Le Progrès-Écho qui va paraître jusqu’en 2014.

Au cours des décennies suivantes, Le Rimouskois et Le Progrès-Écho vont se livrer une lutte sans merci pour tenter de s’arroger la meilleure part du marché publicitaire. D’ailleurs, en 1985, Le Progrès-Écho sera lui aussi distribué gratuitement pour tenter d’obtenir un plus grand nombre de circulaires. Pour informer les lecteurs, les deux hebdos peuvent compter, au départ, sur de bonnes équipes de journalistes. Du côté du Progrès-Écho, Sandy Burgess, lance une chronique intitulée Les Carnets du Mercredi. La salle de presse comprend notamment dans les premières années, Jacques Gédéon, Louis Pineau et Gilles Morrissette. Se sont ajoutés Gilles Boudreault, Jean-Claude Leclerc, Dominique Plante et Louis Morin. Par la suite on voit défiler les Marcel Vaillancourt, Charles Rhéaume, Norman Plourde, Éric Lebel, René Alary, Normand Martin et Thérèse Martin, tandis que Lisette Morin collabore comme éditorialiste.

La première page du tout premier numéro du journal Le Rimouskois le 6 décembre 1967. Est-ce que l’on verra de nouveau ce titre un de ces jours dans un autre journal de la ville ?

De son côté, Le Rimouskois pouvait compter sur Laurent Leblond, qui rejoindra plus tard le Progrès-Écho où il assumera toute la partie culturelle, Claude Dumas, Jean-Yves Thériault, Serge-Éric Mercier, Liz Morency, Maurice Gagnon et Noël Bouchard. Marc Vaillancourt et Claude Couture seront des collaborateurs aux sports. Un peu plus tard, on retrouve Ernie Wells au poste de rédacteur en chef du Rimouskois. Ce dernier embauche Doris Labonté aux sports. Claude Rioux et Hugues Albert notamment seront aussi au nombre des journalistes du Rimouskois.

Durant la décennie 1970 deux autres hebdomadaires vont tenter de faire leur niche à Rimouski : Québec-Est en 1973 et le Vendredi Soir en 1978 qui va paraître six mois. Ce dernier a été lancé par Ernie Wells et Alain Côté avec des capitaux fournis par le propriétaire de l’entreprise Pavages Laurentiens, Paul Côté. L’idée de départ était d’offrir aux habitants de Rimouski un journal de fin de semaine. Le journaliste Ernie Wells recrute une petite équipe formée de René Alary, Benoît Deschênes et Roch Tardif. L’hebdomadaire est imprimé à Québec, ce qui ajoute un défi supplémentaire à une époque où l’informatique en est à ses premiers balbutiements. Cette publication était sur le point de faire ses frais lorsque le principal bailleur de fonds, Paul Côté, décide de retirer ses billes.

En 1983, Ernie Wells va prendre la direction éditoriale du Rimouskois et du Progrès-Écho. Le Rimouskois paraît alors le mardi et le Progrès-Écho le jeudi. Le groupe Bellavance décide de lancer un troisième journal à Rimouski, L’Écho-Dimanche. Vers 1985, relate Ernie Wells, les trois hebdomadaires totalisent chaque semaine 240 pages ! Le journaliste Réal-Jean Couture se joint au Progrès-Écho tandis que l’ex-animateur Jean Brisson tiendra une colonne de potins.

Dans les années 1970 et au tout début des années 1980, il n’y a pas encore de circulaires. En conséquence les commerces et notamment les épiceries, achètent de nombreuses pages de publicité. Dans un journal, plus il y a de pages de publicité, plus on peut ajouter du contenu rédactionnel. Cela a notamment permis au Rimouskois et au Progrès-Écho de se démarquer dans le domaine du sport régional en ayant de volumineuses sections. Au Progrès-Écho, Jean-Claude Leclerc a déjà produit à lui seul 24 pages en une semaine pour le cahier des sports ! Avec le matériel fourni par son collègue René Alary, la section des sports compte souvent 32 pages. Doris Labonté n’est pas en reste au Rimouskois en écrivant de 24 à 28 pages sur le sport régional. Tout comme un quotidien, les journaux rimouskois de cette époque sont si volumineux qu’ils sont constitués en cahiers.

Le 18 avril 1997, l’empire Québecor de Pierre Péladeau achète les 12 journaux hebdomadaires du groupe de Presse Bellavance dans l’Est du Québec dont ceux de Rimouski. Le premier juin 2014, tous ces journaux passent aux mains du groupe Transcontinental (TC Médias).

Le Mouton Noir célébrait récemment son 25e anniversaire.

Le Mouton Noir

Normalement, un journal sérieux doit avoir un éditorial qui donne le ton à la publication. L’éditorial est une prise de position, exprimant l’avis de son signataire sur une question d’actualité et, le plus souvent, de la direction du journal dans lequel il est publié. Un bon éditorial s’articule autour d’une argumentation. À Rimouski, mis à part quelques critiques bien senties dans des articles signés par Lisette Morin, les hebdomadaires n’ont jamais affiché des éditoriaux dignes de ce nom de peur de froisser les élites politiques ou, pire encore, des gens d’affaires susceptibles d’annuler leurs contrats publicitaires en guise de représailles. Le Mouton Noir sera le premier journal rimouskois à proposer aux lecteurs des éditoriaux percutants. D’ailleurs, comme l’indique sa devise « Journal indépendant plus mordant que le loup », Le Mouton Noir fait sa marque comme critique de l’actualité politique, économique et sociale.

C’est Jacques Bérubé qui lance l’idée de ce journal libre de toute attache. Au départ, en 1995, Monsieur Bérubé réunit autour de lui une équipe composée de Pascale Gagnon, Fernande Forest, Denis Leblond et Eudore Belzile. Dès les premiers numéros, les articles du Mouton Noir ébranlent l’establishment rimouskois habitué à une presse écrite plus complaisante. Au fil des années, Le Mouton Noir va faire une large place au monde culturel et aux thématiques reliées à l’écologie et au développement durable. Publié six fois l’an, Le Mouton Noir est tiré à 10 000 exemplaires et distribué gratuitement.

Le quotidien Le Fleuve, une histoire éphémère…

Le quotidien Le Fleuve

Le lancement du journal Le Fleuve à Rimouski le 16 mai 1996, premier et unique quotidien imprimé à être publié dans le Bas-Saint-Laurent, fut un événement majeur dans l’univers des médias. Comme nous l’avons vu, depuis un siècle, les journaux nationaux parvenaient dans la région mais aucun ne reflète la réalité et les préoccupations de la population du Bas-Saint-Laurent comme le fait par exemple Le Quotidien au Saguenay-Lac-Saint-Jean. C’est ce vide que souhaite combler Robert Maltais en fondant Le Fleuve, avec le soutien financier du Fonds de solidarité régional de la FTQ.

Le rédacteur en chef du Fleuve, Robert Maltais, est un vétéran des salles de nouvelles du quotidien Le Soleil à Québec et de Radio-Canada à Rimouski. Il réunit une équipe de journalistes composée de Louis Belzile, directeur de l’information, des chefs de pupitre Serge Lavoie et Christian Pelletier et des journalistes Alexandre Gagné, Linda Grondin, Pierre Langlois, Pierre Morissette, et Éric-Pierre Gibeault à Rimouski, Yves Sénéchal à Mont-Joli, Dany Plourde et Ghislain Morissette à Rivière-du-Loup, ainsi que Marc Lemieux et Geneviève Bouffard à Matane. Le Fleuve compte aussi sur une équipe de collaborateurs.

Malheureusement le journal ne reçoit pas l’appui régional sur lequel il compte, particulièrement dans les secteurs de Rivière-du-Loup et Matane où les abonnés se font rares. De plus, des décisions douteuses des dirigeants comme le lancement du journal à l’approche de la période des vacances d’été, l’embauche d’un nombre d’employés nettement supérieur à celui du plan d’affaires, un loyer trop coûteux et la difficulté à percer le marché publicitaire détenu par Québecor, placent rapidement le journal dans une impasse financière. L’aventure du seul quotidien bas-laurentien prend fin abruptement par une faillite sept mois plus tard soit le 17 décembre 1996.

L’Avantage consommateurs fondé par Jean-Claude Leclerc

L’Avantage

Le 23 mai 1996 paraît à Rimouski le tout premier numéro du journal hebdomadaire L’Avantage consommateurs qui sera renommé plus tard L’Avantage. Il s’agit d’une initiative du journaliste et éditeur Jean-Claude Leclerc. Avec l’appui de l’homme d’affaires Gonzague Drapeau, Monsieur Leclerc achète une grande partie du matériel informatique du défunt quotidien Le Fleuve. Au départ, le journaliste souhaite faire un journal traditionnel. Toutefois, L’Avantage consommateurs adoptera d’abord une formule combinant des publireportages et des chroniques sans aucune place pour l’actualité. Le journal est l’un des premiers au Québec imprimé totalement en couleur et sur du papier glacé de surcroit.

Progressivement, la publication va se transformer. Le nombre de pages augmente et finalement une salle de rédaction est mise en place. Jean-Claude Leclerc s’entoure de quatre autres journalistes ; René Alary, Jean-François Bouchard, Thérèse Martin et Laurent Leblond. Charles Lepage, Pierre Michaud et Alexandre D’Astous se joindront aussi au groupe. On embauche des graphistes et L’Avantage se dote d’un atelier de composition et de montage. Une division appelée Avantage Concept est créée pour la réalisation de publicités où de différents types de publications. Bientôt, l’entreprise compte 40 employés ! Après quelques années, Jean-Claude Leclerc vend L’Avantage à son partenaire Gonzague Drapeau. Ce dernier revend le journal au groupe Transcontinental le 29 août 2011 puis, Lexis Média en fait l’acquisition en juin 2018.

Une journée noire pour la presse

Le 3 septembre 2014 marque la fin d’une époque pour la presse écrite au Bas-Saint-Laurent avec la fermeture décrétée par le groupe Transcontinental de quatre journaux hebdomadaires ; Le Rimouskois et le Progrès-Écho de Rimouski, le Saint-Laurent-Portage de Rivière-du-Loup et la Voix de la Matanie de Matane. Près d’une vingtaine de personnes perdent leur emploi. Cette affaire découle de la transaction conclue le 1er juin 2014 par Transcontinental (TC Média) pour l’achat de 74 journaux de Québecor dans la province. À la suite de cette entente, le Bureau de la concurrence ordonne à Transcontinental de mettre en vente 33 hebdomadaires. Malheureusement, quatre d’entre eux ne trouvent pas preneur et Transcontinental décide de les fermer. Seul va subsister L’Avantage à Rimouski mais, depuis trois ans, son contenu diminue comme peau de chagrin.

Le premier journal rimouskois en version électronique.

Le Soir

Au moment où l’on croyait avoir tout vu, l’entreprise rimouskoise Tendance EIM annonce le 16 octobre 2019 le lancement d’un quotidien numérique appelé journal le soir. Sous la gouverne de l’éditeur Pierre Chassé et de la directrice générale Geneviève Dionne, ce nouveau média se donne pour mission de desservir la MRC de Rimouski-Neigette en favorisant une pluralité de l’information. L’équipe se compose de quelques journalistes d’expérience dont Pierre Michaud, René Alary et Alexandre D’Astous auxquels s’ajoutent 13 chroniqueurs. Depuis la première journée, le nombre de personnes qui visitent le site web du journal le soir connaît une croissance exponentielle et ce média semble avoir atteint une vitesse de croisière intéressante.   

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