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Un bâtiment témoin de l’histoire de Chabanel disparaîtra

Photo: Collaboration spéciale - mni-mtl.com

Une ancienne usine de munitions datant de la Seconde Guerre mondiale sera entièrement démolie pour permettre la construction d’une cour de services et des bureaux pour la ville. Légalement, l’édifice ne peut être préservé, faute de classement patrimonial.

«Il n’y a plus d’usine d’armement de la Seconde Guerre mondiale à Montréal, c’était la dernière encore debout», déplore Vincent Garneau, coprésident de la toute nouvelle Société d’histoire d’Ahuntsic-Cartierville (SHAC). Le bâtiment, situé au 9500, boul. Saint-Laurent, n’était ni classé ni reconnu pour sa valeur historique. Il était de plus le premier bâtiment construit dans le secteur industriel Chabanel.

«C’est malheureux d’entendre dire que les bâtiments ne sont pas classés et qu’on peut les démolir. Même la basilique Notre-Dame n’est pas classée», s’insurge Dinu Bumbaru, directeur des politiques d’Héritage-Montréal. Il attribue cette situation aux retards accumulés au long des années pour faire l’inventaire des édifices à valeur historique. «Montréal a connu environ 50 000 démolitions entre 1960 et 2000», indique-t-il. Il n’exclut pas que des édifices qui auraient pu être classés aient été mis à terre.

Une histoire invisible
L’ancienne usine de munition est cachée par les immeubles construits dans les années 1970 qui constituent aujourd’hui la trame du boulevard Saint-Laurent à ce niveau. Elle n’est accessible que par la rue Louvain.

La semaine dernière, un important incendie a touché une extension à l’arrière de l’immeuble et a dû être mise à terre. Les terrains et la bâtisse ont été acquis par la ville en 2012 et il a été décidé de réaliser à la place une cour de services pour réunir en une seule les quatre cours existantes dans l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville et construire des bureaux.

Pour Valérie Nadon, historienne et également coprésidente de la SHAC, cette ancienne usine à munitions a une importance historique incontournable. «Sur le plan québécois, c’est un des rares témoins de notre implication dans la Seconde Guerre mondiale et comme cette industrie relève des politiques internationales canadiennes, l’importance patrimoniale et historique du bâtiment relève donc également de l’histoire pancanadienne.»

L’usine, construite en 1943, appartenait à  Defence Industries Ltd, une société fédérale qui possédait cinq usines dans le grand Montréal. Celle d’Ahuntsic a été utilisée pour l’effort de guerre pendant un an et demi. Le bâtiment a ensuite servi d’atelier de textile puis d’usine de plastique.

«On regarde un peu de haut le patrimoine industriel parce qu’il n’est pas valorisé architecturalement, constate M. Bumbaru. Mais, on oublie que Montréal est aussi une métropole industrielle. Ce n’est pas seulement un établissement mystique et un comptoir commercial sous l’empire français.» Dans les années 1940, la ligne de tramway avait été continuée jusqu’à ce niveau et un terminus avait été édifié pour permettre aux ouvriers et surtout aux ouvrières d’arriver à leur lieu de travail.

Bâtiment oublié
À l’arrondissement, on préfère parler de déconstruction au lieu de démolition. Le contrat de plus de 1,8M$, accordé le 26 octobre, à l’entreprise Delsan – A.I.M. inc. stipule «la déconstruction sélective de bâtiments». Les travaux doivent être achevés au printemps 2016. Lorraine Pagé, conseillère du Sault-au-Récollet, parle de déconstruction durable. L’entrepreneur devra récupérer tout ce qui est récupérable.

Pour M. Garneau et pour les membres de son organisme, toute mobilisation pour préserver ce qui reste de l’édifice arrive en retard. Toutefois, il serait utile de garder des rappels. «Ce serait bien d’avoir un panneau d’interprétation ou garder des pans de murs pour rappeler ce que c’était.»

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